• Grégoire Bouillier, Le cœur ne cède pas

    Grégoire Bouillier, Le cœur ne cède pas 

    Rentrée littéraire 2022 #28

    Grégoire Bouillier, Le cœur ne cède pas

    Il est des livres dont on dit qu’ils vous tombent des mains. Ne serait-ce que par le poids de ses 912 pages, celui-ci a tout ce qu’il faut pour ça. L’histoire avait pourtant tout ce qu’il fallait pour attirer le lecteur curieux et avide des détails de vie des gens ordinaires. Marcelle Pichon, ancienne mannequin, s’est laissée mourir de faim à 64 ans, seule à son domicile parisien, tenant durant quarante-cinq jours le journal de son agonie dans un cahier d’écolier. Cela s’est passé à Paris, dans le 18e, en octobre 1985. Son corps sera découvert dix mois plus tard. Le narrateur (l’auteur ?) a entendu l’information à l’époque, sans y accorder plus d’attention que ça. Mais elle reste dans un coin de sa tête et quand, en 2018, l’affaire lui revient par hasard, il décide de se lancer dans une enquête pour savoir qui était Marcelle Pichon, pourquoi elle s’est suicidée et de cette façon.

    De ce sujet en or, Bouillier tire plus de 900 pages, multipliant les longues digressions les plus variées, dont on peine parfois à déceler le lien – que l’on accepterait pourtant éloigné ou allusif – avec le sujet. On a tout de même droit à la généalogie de Marcelle jusqu’à ses arrière-arrière-grands-parents, alignant les chapitres sur des dizaines de pages ! Entre autres. Mais il en sait si peu… Aussi additionne-t-il les conditionnels, les points d’interrogation, les peut-être, il semble que, tout indique que et les je ne sais pas.

    On se lasse. Il faut l’avouer, on glisse parfois rapidement sur des pages, des chapitres. On ressent parfois le besoin d’un coup de pouce pour en donner les milliers nécessaires à faire avancer le récit sur sa liseuse. Il y aura cependant de bons moments, émouvants, drôles, révoltants. L’enquête obtient des résultats et Marcelle sort de l’ombre dans laquelle elle s’était elle-même repliée, avec la complicité d’une société oublieuse. Et chaque nouvelle information, chaque témoignage offre un nouveau visage de la suicidée, comme si on l’éclairait avec un projecteur de théâtre devant lequel on change des filtres colorés, nous conduisant jusqu’au bout (car on y alla !) de surprise en surprise !

    Et à la fin, pour se changer les idées, on pourra se (re)plonger dans les « Vies minuscules » de Pierre Michon. Mince ! Michon, Pichon, à une lettre près… Pierre, comme l’arrière-grand-père de Marcelle… On tient quelque chose, là !

    Reste que Le cœur ne cède pas est un objet littéraire original, d’autant qu’il s’accompagne d’un site (lecoeurnecedepas.fr) reprenant toute la matière accumulée par l’auteur durant ses recherches, photos, lettres, coupures de presse, etc. On s’approche du webdoc !

    Grégoire Bouillier, Le cœur ne cède pas, Flammarion, 912 pages

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