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Philibert Humm, Roman fleuve
Rentrée littéraire 2022 #29
Philibert Humm, Roman fleuve
Après les 912 pages du Bouillier, quoi de plus logique que d’enchaîner avec ce Roman fleuve ? Pour autant, celui-ci est plus modeste quant à la longueur. Encore que l’on pourrait considérer que la descente de la Seine de Paris à la mer, avec ses 360 kilomètres, tous méandres compris, dame le pion aux errances parisiennes du premier nommé. Las, nous ne sommes pas dans une bataille de chiffres.
Ce roman aquatique nous conte donc l’expédition de trois jeunes hommes qui entreprennent de rejoindre la mer depuis le pont Garigliano (précision pour les Parisiens) à bord d’un canoë à deux places, à la seule force de leurs bras maniant des pagaies.
Humm dut téter tout jeune à la mamelle du regretté Alphonse Allais – auquel honnêtement il rend hommage en lui empruntant comme exergue cette phrase « Quand on pense à toutes les bizarreries qu'il est si facile d'éviter en n’allant jamais plus loin que Ville-d'Avray. » – auprès duquel Alphonse donc il se nourrit de cette propension à transformer la moindre banalité en scène capable de déclencher chez le lecteur de bonne volonté le sourire qui, à trop le répéter, produit les faces ridées de ceux qu’il est convenu de nommer « les vieux drôles ». Cette faculté trouve d’autant ses aises que le cadre de l’histoire qui nous est narrée n’est autre, au moins dans sa partie finale, que la Haute-Normandie, où naquit l’humoriste, à Honfleur plus précisément.
On entend souvent dire par des mines attristées que l’humour est le genre le plus difficile dans la littérature. On pourrait se demander si les auteurs de cette remarque ne sont tout simplement que parfaitement dénués du sens de l’humour, ne réalisant même pas ce que leur opinion a de désopilant ! Ce Roman fleuve est bourré d’humour, autant dans le ridicule de certaines scènes que dans l’écriture elle-même.
De là à lui décerner le prix Interallié, il y avait un pas. Mais voyez comme le hasard fait bien les choses. On apprend dans le roman que l’auteur est un bon ami de Sylvain Tesson (on les vit même s’amuser récemment ensemble à la grande librairie) et que le père de Sylvain, ledit Philippe Tesson, accueillit les trois aventuriers du roman au bout de leur épopée. Lequel Philippe (c’est là que le hasard surgit) n’est autre que le président du jury du prix Interallié… Décidément, de Paris à la mer, le monde est bien petit !
Philibert Humm, Roman fleuve, Équateurs, 288 pages
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