• Clichés marseillais #15

    Clichés marseillais #15

    Amour irraisonné

    Clichés marseillais #15Il y a bien des choses que je peux accepter de la part d’une femme : la beauté, l’intelligence, le charme, l’humour, la gentillesse. Je ne fais pas la fine bouche devant l’amour irraisonné qu’elle peut éprouver à mon égard. Son appétit pour les réjouissances du corps et pour la bonne chère ne me laissera pas indifférent. On voit par là que je ne suis pas regardant et que ma largeur d’esprit m’amène à apprécier les personnalités les plus variées.
    Je montre d’égales dispositions concernant la cuisine, ne m’effrayant pas des expériences les plus osées.
    Mais comme pour tout un chacun, ma tolérance n’est pas sans limites. La récente mésaventure que je connus vient le confirmer. J’avais rencontré une créature tout ce qu’il y a d’attirant, dont la clarté des yeux illuminait la noirceur d’une magnifique chevelure. Ses propos m’avaient immédiatement enchanté, alternant un solide humour qu’auraient pu lui envier bien des porte-parole gouvernementaux et une férocité sans rivale pour la bêtise humaine que les mêmes pouvaient craindre comme coronavirus en goguette.
    Passons sur le reste de ses appâts dont la description ne ferait que vous donner des regrets de ne la point connaître. Après quelques rendez-vous en terrain neutre, qui nous permirent de vérifier que les américanos n’étaient pas la mixture qui nous rebutait le plus et que nous ne craignions pas une belle poêlée de supions en persillade avant certains rapprochements, elle m’invita chez elle pour souper. Cela me semblait du meilleur augure.
    Je m’apprêtai donc méticuleusement pour l’occasion et me présentai avec le quart d’heure de retard recommandé par Nadine de Rothschild et un bouquet de lys préparé ma ma fleuriste attitrée. Je remarquai que ma future conquête avait revêtu une chemise blanche fraîchement repassée, un jeans délavé sortant de la penderie et des Converse de la machine à laver. Ce qui ne changeait en rien de sa tenue ordinaire. La table était dressée entre la cuisine et la piscine, je l’étais dès l’entrée. Le rosé était frais, le jasmin embaumait. Les voisins, résidents du cimetière voisin, manifestaient avec force leur calme habituel. Les choses se présentaient au mieux. C’était la première fois que je me trouvais chez la dite personne et je comptais bien à cette occasion explorer de nouvelles facettes de sa personnalité.
    Tout se passait à merveille, jusqu’au moment où elle emplit mon assiette. J’y jetai un coup d’œil, posai ma serviette sur la table, me levai et quittai la place sans un mot ni un regard : elle avait mis des carottes dans la soupe au pistou.
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